Introvertis, extravertis et télétravail : dépasser la caricature pour mieux comprendre nos besoins

Fév 3, 2025Collaboration


Introvertis, extravertis et télétravail : dépasser la caricature pour mieux comprendre nos besoins.

La généralisation du télétravail a fait ressortir différents profils de personnalité et leurs réactions face à cette nouvelle organisation. On a parfois tendance à opposer les « introvertis » heureux de leur tranquillité au quotidien et les « extravertis » frustrés par la réduction des contacts sociaux. Pourtant, réduire ces différences à une simple dualité est trop réducteur.

Dans la réalité, chacun peut osciller entre des besoins de solitude et des besoins de relation, selon les circonstances. Alors, comment comprendre ces différentes tendances et, surtout, comment rendre le télétravail plus inclusif et épanouissant pour tous ?


1. Comprendre la nuance : du continuum introversion-extraversion à l’ambiversion

Contrairement à une vision binaire, la plupart des spécialistes de la psychologie considèrent l’introversion et l’extraversion comme les deux pôles d’un même continuum. Ainsi, on peut être plus ou moins introverti ou extraverti, et beaucoup de personnes se situent même au milieu : ce sont les ambiverts, qui apprécient aussi bien des moments de solitude pour se ressourcer que des temps forts de socialisation.

Qu’est-ce qui différencie vraiment introvertis et extravertis ?
  • Le niveau de stimulation : les extravertis recherchent souvent un environnement énergisant, alors que les introvertis se sentent plus à l’aise avec un rythme calme et moins d’interruptions.
  • La manière de se ressourcer : les extravertis rechargent leurs batteries au contact des autres, tandis que les introvertis récupèrent dans la solitude ou lors d’interactions plus contenues.
  • La communication : les extravertis parlent volontiers pour exprimer leurs idées spontanément, les introvertis préfèrent souvent un temps de réflexion avant de partager leur point de vue.

Ces caractéristiques ne sont toutefois pas figées : on peut avoir besoin, à certains moments, de se connecter intensément aux autres, et à d’autres, de s’isoler pour retrouver son énergie.


2. Télétravail et besoins spécifiques : un équilibre délicat

2.1. Les apports du télétravail pour les personnes plus introverties
  • Moins de sollicitations directes : Être dispensé de l’effervescence de l’open-space permet de se concentrer davantage et d’éviter la fatigue sociale.
  • Une communication plus asynchrone : Les échanges par mail ou chat laissent le temps de formuler des réponses structurées et de clarifier sa pensée.
  • Moins de pression sociale : Les contacts se font en général sur rendez-vous (visioconférence, appels), ce qui peut réduire le stress lié à l’improvisation constante.

Mais l’introversion ne rime pas forcément avec isolement complet : certains introvertis souffrent aussi du manque de contacts et de la diminution des moments de convivialité informels qui consolident le sentiment d’appartenance.

2.2. Les défis du télétravail pour les personnes plus extraverties
  • Manque de stimulation sociale spontanée : L’impossibilité de croiser des collègues entre deux réunions ou d’échanger des idées de façon informelle peut entamer la motivation.
  • Visioconférences et fatigue mentale : Paradoxalement, les extravertis, en quête de contact, peuvent se retrouver à enchaîner les réunions en ligne, générant un phénomène de “Zoom fatigue”.
  • Risque de dispersion : À la maison, l’extraverti peut souffrir d’un contexte moins adapté à sa recherche d’échange, tentant parfois de multiplier les activités en ligne pour compenser, et finissant par se sentir submergé.

Pour autant, être extraverti ne signifie pas toujours préférer le bureau à 100 %. Certains peuvent aussi apprécier une forme de flexibilité et la possibilité de s’isoler pour des tâches qui nécessitent concentration.


3. Les pièges d’une vision trop manichéenne

Opposer frontalement les « gagnants introvertis » aux « perdants extravertis » (ou inversement) revient à méconnaître la complexité humaine. Plusieurs facteurs entrent en jeu :

  1. Le contexte familial et matériel : Vivre seul ou avec plusieurs colocataires/une famille nombreuse peut changer complètement la donne, indépendamment de l’orientation introvertie ou extravertie.
  2. La nature du travail : Certains métiers requièrent de la collaboration en temps réel, d’autres des phases de concentration intense. Selon que l’on soit ingénieur, commercial, designer, enseignant, etc., le rapport au télétravail varie.
  3. Les préférences personnelles plus fines : Certains introvertis aiment quand même participer à des réunions d’équipe courtes et dynamiques ; certains extravertis apprécient des plages de calme absolu.

4. Vers un télétravail plus « sur mesure »

4.1. Flexibilité et hybridation

De nombreuses entreprises optent désormais pour un modèle hybride (2-3 jours de télétravail, le reste en présentiel). Cette solution concilie davantage les besoins variés :

  • Les introvertis bénéficient toujours de plages de calme pour travailler sans interruption.
  • Les extravertis retrouvent régulièrement la dynamique de groupe dont ils se nourrissent.
4.2. Varier les modalités de communication
  • Mails, chats, forums internes : Utile pour donner le temps à ceux qui réfléchissent par écrit.
  • Réunions informelles ou virtuels cafés : Prévues à un rythme raisonnable, elles comblent le besoin d’échange social.
  • Moments de feedback individuel : Organiser des temps d’échange personnalisés permet de s’adapter à la sensibilité de chacun.
4.3. Favoriser la responsabilisation et l’autonomie

Chaque collaborateur, qu’il se reconnaisse plus introverti ou extraverti, doit pouvoir aménager son espace et son emploi du temps de manière à optimiser son bien-être et sa productivité. Cela passe par un dialogue continu avec le management pour ajuster la charge de travail, la fréquence des réunions et le mode de communication.


Conclusion : dépasser les étiquettes pour mieux collaborer

Au-delà des étiquettes « introverti » et « extraverti », la réalité est plus complexe et nuancée. Le télétravail a permis de révéler l’importance d’adapter l’environnement de travail à la diversité des modes de fonctionnement : certains besoins se recoupent, tandis que d’autres peuvent sembler contradictoires. La clé réside dans une organisation flexible, capable de proposer des solutions sur mesure pour chaque collaborateur, indépendamment de son profil.

Plutôt que de creuser les oppositions, cette révolution dans notre rapport au travail peut devenir l’occasion de mieux se connaître et de dépasser une vision trop rigide de l’introversion et de l’extraversion. Chacun est amené à naviguer entre différents besoins relationnels et différents rythmes de travail, et c’est précisément cette richesse qui, lorsqu’elle est bien gérée, nourrit la performance collective autant que l’épanouissement personnel.


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